Palaces, Rolls-Royce, gardes du corps, jets privés… Nombre de télévangélistes américains mènent un train de vie royal. Ils ne paient pas d’impôts car les organisations religieuses en sont dispensées. La loi ne les oblige pas non plus à ouvrir leurs livres de comptes. Certains perçoivent des subventions accordées par l’administration Bush aux «actions sociales basées sur la foi», en plus de sommes impressionnantes, estimées à 2,5 milliards de dollars par an, que leur versent leurs fervents donateurs. Début novembre, un sénateur républicain de l’Iowa, Chuck Grassley, a lancé une enquête sur six de ces papes de la télévision, dont le truculent Benny Hinn. Ils ont jusqu’au 6 décembre pour révéler le montant de leurs revenus et la nature de leurs dépenses au fisc américain qui, curieusement, leur laissait jusqu’alors le bénéfice du doute.
Le culte de l’argent, commun aux centaines de télévangélistes, se double d’une croyance dans le pouvoir de guérisseur du prêtre de la télévision. Au cours de spectaculaires mises en scène, le vicaire cathodique impose les mains sur le front des malades, en affirmant les guérir du cancer ou du sida… Ces scènes, courantes sur les 350 chaînes de télévision évangéliques américaines – «la Chaîne divine», le «réseau de diffusion Trinité», etc. –, incitent les crédules à ouvrir leur portefeuille. Selon la Trinity Foundation, une organisation indépendante, les 500 télévangélistes et 750 radio-évangélistes américains se disputent les porte-monnaie d’un «groupe de personnes relativement restreint de 5 millions de personnes». Il s’agirait pour la majorité «de femmes âgées». «Les autres sont les personnes les plus pauvres et les plus désespérées de la société, explique-t-on à la Fondation. Des gens atteints d’un cancer, du sida, où sur le point d’être jetés à la rue». Lorsqu’ils n’ont plus d’argent à donner, ils envoient leur alliance de mariage ou leur food stamps, ces tickets d’achat alimentaire que le gouvernement attribue aux plus démunis.
Indigné par cette exploitation, Rusty Leonard, ancien directeur d’une firme d’investissements, a fondé en 2000 l’organisation Ministrywatch. Son objectif: contraindre les églises cathodiques à la transparence. Une trentaine figure sur sa liste noire. Il stigmatise celle de Paul Crouch et de sa femme Jane, qui apparaît toujours à la télé affublée d’une impressionnante perruque. Entre deux prophéties, elle a l’habitude de glisser : «Je ne m’intéresse pas à l’argent.» «En réalité, expliquait récemment Leonard, les Crouch ont accumulé un trésor de 340 millions de dollars. Ils possèdent une maison de 6 millions de dollars, une autre de 3… et se déplacent dans un jet de 7 millions de dollars.» «Ces critiques veulent que nous soyons humbles et pauvres comme Jésus, enfin ils disent qu’il l’était… Mais si les gens de Dieu sont pauvres, espèces d’imbéciles, qui va payer pour envoyer la bonne parole aux quatre coins du monde ?» a rétorqué Paul Crouch sur sa télévision. Sa femme, coiffée pour l’occasion d’une choucroute himalayenne, n’a pas hésité à qualifier Leonard, son accusateur, de «Satan».
Source : Libération
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