L'image des Etats-Unis est à ce point dégradée outre-Rhin que des étudiants américains viennent expliquer leur pays à des lycéens allemands dans le cadre d'un programme semi-public.
Pendant que la chancelière allemande, Angela Merkel, profitait de l'hospitalité du président Bush dans son ranch de Crawford, au Texas [le 10 novembre], une petite ville allemande était le théâtre d'une autre scène de la diplomatie transatlantique. Dustin Byers, 20 ans, originaire de l'Oregon, était l'invité du cours d'anglais du professeur Brake, au lycée Otto Hahn de Nagold [dans le Bade-Wurtemberg], où il avait été convié pour parler de la politique étrangère des Etats-Unis. Sa visite faisait partie d'une initiative locale menée pour lutter contre l'antiaméricanisme des jeunes Allemands en les mettant face à face avec de "vrais Américains".
Aujourd'hui, les Allemands sont plus critiques envers les Américains que n'importe quelle autre nation européenne. Même les Vénézuéliens, les Chinois et les Russes tiennent les Etats-Unis en plus haute estime que les Allemands, révèle la dernière enquête Pew Global Attitudes. Dustin Byers, étudiant participant à un échange universitaire à Tübingen, fait partie d'un petit bataillon de jeunes Américains envoyés dans les écoles de la région pour inverser la tendance qui voit l'Allemagne passer du statut de meilleur ami des Etats-Unis à celui de bastion européen de l'antiaméricanisme. Byers a bien fait comprendre qu'il ne partageait pas les idées de son président et n'a pas hésité à condamner la politique étrangère de Washington. "Il n'y avait aucun lien entre le 11 septembre et l'Irak", a-t-il déclaré. La guerre préventive n'est pas une politique étrangère, c'est une agression."
Odila Triebel, qui a aidé à organiser cette visite, n'était pas mécontente. Pour elle, l'objectif de ce programme est de faire comprendre que les Américains se posent les mêmes questions que les Allemands. "Nous voulons leur ouvrir les yeux, explique-t-elle. Ce genre de visite devrait inciter les jeunes à se renseigner un peu plus." L'idée semble avoir porté ses fruits, du moins pour Kathrin Schön, 18 ans, qui s'est dit "abasourdie" par la sévérité du jugement porté par Byers. "Nous n'entendons jamais ces Américains-là."
La fin de l'idylle germano-américaine a été soudaine, indique l'étude Pew. Alors qu'une majorité d'Allemands avaient une opinion favorable des Etats-Unis en 2002, leur nombre a chuté à 30 % cette année. Il y a quelques mois, lors d'une conférence, Ute Bechdolf, directrice de l'Institut germano-américain (DAI) de Tübingen, avait rappelé la dette des Allemands envers les Etats-Unis, qui ont joué un rôle essentiel dans le rétablissement de la démocratie après la Seconde Guerre mondiale. "Il y a eu des ricanements dans toute l'assemblée, raconte-t-elle. L'idée de présenter les Etats-Unis comme un modèle de démocratie est devenue quelque chose de risible."
Source : Courrier International
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