Jacques Rainier est né vingt-cinq ans trop tôt. Car aujourd'hui, grâce aux progrès de la médecine, « au-delà de cette limite, son ticket serait resté valable », pour pasticher le titre du célèbre livre de Romain Gary dont cet industriel de 59 ans est le héros. Avec les nouveaux médicaments destinés à réveiller la virilité, il n'aurait pas été assailli par la peur de la panne qui conduit à la panne et à son cortège de doutes et de questions.
La dysfonction érectile, autre nom donné à l'impuissance, concernerait 152 millions d'hommes dans le monde. En France, ils seraient entre 2,5 et 3 millions, selon les estimations, à ne pouvoir, de façon temporaire ou permanente « obtenir ou maintenir une rigidité pénienne suffisante pour l'accomplissement de l'acte sexuel », selon la définition officielle. Des chiffres d'autant plus difficiles à vérifier que, malgré le nombre d'articles et d'émissions radio et télé consacrés à ce sujet depuis quelques années, la maladie reste taboue pour la majorité de la population.
Selon les études, un quart à un tiers des hommes, quand ils sont interrogés directement par des médecins, avoueraient avoir été confrontés à ce problème au cours des 6 à 12 mois précédant l'enquête. Mais ils hésitent encore fréquemment à en parler à leur généraliste, même s'ils savent qu'il existe maintenant une « roue de secours » facile à utiliser.
Le dialogue avec les « blouses blanches » reste donc compliqué, bien que les médecins se sentent moins « impuissants » depuis l'arrivée des nouveaux traitements. Trop souvent encore, chacun attend de l'autre qu'il fasse le premier pas, qu'il pose « la » question. En revanche, les spécialistes qui viennent d'opérer leur patient d'un cancer de la prostate, ceux qui le suivent pour une maladie chronique comme un diabète ou ceux qui prescrivent des médicaments susceptibles d'avoir des effets néfastes sur la virilité, évoquent en général directement ce sujet.
Quant aux femmes, elles sont de plus en plus nombreuses à ne pas rester inactives. Ce sont souvent elles qui poussent leur compagnon à prendre un rendez-vous, qui l'accompagnent pour participer à la discussion avec le médecin, voire qui vont consulter d'abord, « en éclaireur », pour connaître toutes les solutions existant aujourd'hui. L'amour, c'est bien une question de couple.
Anne Jeanblanc
www.point.fr du mardi 1er août
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